Les Fables de La Fontaine
Faussement naïves, pleines d'humour et de fantaisie, les Fables de Jean de La Fontaine (1621-1695) sont parues en deux receuils, en 1668 et en 1678.
Elles étaient à l'origine destinées au fils aîne de Louis XIV, âgé de six ans en 1668.
Alternance de dialogues et de récits, elles ressemblent à de courtes pièces de théâtre, mettant souvent en scène animaux mais aussi des hommes, de l'enfant au vieillard, de la laitière au grand financier, du seigneur au serf.
Moins juge que témoin, La Fontaine décrit la monde et la comédie humaine comme il les voit, non sans proposer une philosophie de la vie consistant à accepter l'existence du mal tout en évitant de le provoquer.
Sage, ennemi des passions, La Fontaine y défend aussi le bien le plus sacré des hommes, la liberté, à laquelle il s'agit de sacrifier le confort matériel et l'ambition.
Le corbeau et le renard
Maître Corbeau, sur un arbre perché,
Tenait en son bec un fromage.
Maître Renard, par l'odeur alléché,
Lui tint à peu près ce langage :
Et bonjour, Monsieur du Corbeau,
Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau !
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage,
Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois.
À ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie,
Et pour montrer sa belle voix,
Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.
Le Renard s'en saisit, et dit : Mon bon Monsieur,
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l'écoute.
Cette leçon vaut bien un fromage sans doute.
Le Corbeau honteux et confus
Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.
C'est la seule dont je me souvienne en entier. Et vous, en avez-vous retenu une ?